Le Strip, c’est le coeur de Las Vegas, personnage central de ce lourd roman : six kilomètres d’asphalte saturés de néons, éclaboussés de musique assourdissante se déversant sur une inimaginable concentration d’hôtels et de salles de jeux. Des hommes et des femmes frustrés, perdus, désagrégés y déambulent, croisant des enfants fugueurs, dont Newell, douze ans. Ce fou de BD a quitté des parents aimants, laissés tragiquement à leurs interrogations et à leurs souvenirs. De nombreux acteurs aux parcours dramatiques règlent leur enfance saccagée dans l’autodestruction, le sexe, la drogue, la cruauté. Ils convergent en des lieux de rencontres et s’affrontent dans un road movie à la funeste destination.
Ce premier roman ne manque pas de souffle : celui du désert si proche, celui d’une écriture efficace et cinématographique pour peindre cette terrifiante société dépassée par son irresponsable permissivité. Une émotion, l’espoir d’un destin apaisé, d’une rédemption, se profile fugacement chez certains. Mais l’éclatement du récit, la violence, le déferlement d’une pornographie complaisamment étalée, la crudité du langage terrassent. Dans cette fresque spectaculaire, l’auteur a voulu stigmatiser la marginalité d’une ville américaine particulière. Y est-il parvenu ?