Dans l’esprit du désert, accueillir un voyageur obéit à la loi la plus élémentaire. Cependant, annexant le puits qui lui est offert, un sultan bâtit une cité, nouvelle Tombouctou vouée au commerce et au métal précieux. Il trahit ainsi le Coran selon lequel, dans le coeur du croyant, Dieu et l’or ne peuvent cohabiter ; il trahit aussi la sagesse ancestrale qui dit que le Saharien doit être nomade et le pacte des Mages qui déclenchent alors la colère du vent. Avec pour cadre le désert, qui trace son destin, le peuple saharien a ses rites et ses croyances auxquels Al-Koni donne corps, rebondissant d’un chapitre à l’autre de la montagne à la plaine. Le quotidien est entrecoupé de légendes, polyphonie du ciel et de la terre où le rire des djinns répond parfois à celui des humains. Ici, la modestie sied à la nature et la patience est le plus précieux des sortilèges. Ceux qui l’ont oublié le paieront le prix fort. Au fil des pages l’envoûtement opère, quand Al-Koni, d’une écriture délicate, délaissant la trame au profit de la méditation, célèbre la mémoire du désert.
Les Mages.
AL-KONI Ibrahim