Le texte est fidèle aux frères Grimm. En revanche, l’illustration se distingue par son parti-pris d’originalité. Il serait difficile de comprendre le texte en suivant simplement les images! Des juxtapositions de formes de couleurs sourdes, souvent « sales », et contrastées (gris, vert, marron, noir, rouge et jaune, ainsi, plus rare, qu’un peu de bleu foncé) composent un paysage géométrisant, qui n’hésite pas à se déstructurer sur le bord (envahi par le blanc de la page), donnant l’impression étrange et inconfortable que l’univers est au bord de l’effondrement – ce qui n’est pas faux pour ces animaux.
Sur ce fond à l’acrylique proche de l’abstraction, les héros, représentés (le plus souvent) au crayon, de façon classique et réaliste, apparaissent fragiles -sauf le coq, qui semble un humain déguisé, et quelques épisodes anthropomorphisant pour l’un ou l’autre. Les maisons, bien reconnaissables, peuvent servir de repère rassurant – quand elles ne sont pas réduites à une silhouette. Des détails incongrus surgissent de-ci de-là, souvent issus d’une imagerie western. L’ensemble laisse un sentiment de monde instable, inquiétant et crépusculaire, que la dernière page, malgré les sourires arborés, ne modifie pas.