Les Onze

MICHON Pierre

C’est la nuit du 5 janvier 1794, au coeur de la Terreur, que François-Elie Corentin reçoit commande du monumental tableau « les Onze » que l’on peut voir au Louvre, tout au bout du Pavillon de Flore. Cette toile où figurent, au grand complet, les membres du « Comité de Salut Public » de l’an II, date de la maturité du peintre. Sur sa naissance en bord de Loire, son père absent, sa place d’enfant-roi entre mère et grand-mère, les traces de ses débuts consignés ici et là, une sorte de bonimenteur de musée fait le compte sur le mode de l’apostrophe… tandis que Pierre Michon énumère les noms des commissaires comme s’il scandait une ténébreuse comptine…

 

C’est encore une vie que l’auteur raconte, mais totalement fictive cette fois (cf. Corps du roi, NB décembre 2002) avec en filigrane sa propre généalogie, la caution d’illustres maîtres et des allusions symboliques. Entre douceur des temps anciens et avènement sanglant d’une ère nouvelle, tout un théâtre de lumières et d’ombres se déploie. La langue est précise et superbe, les détails saisissants, le ton souvent narquois n’entame en rien l’adhésion au récit… Comment, d’ailleurs, résister à la Littérature ?