Rocca déteste la neige, l’Italie lui manque, mais son emploi dans une fabrique de caméras le contraint à supporter les longs hivers du Jura suisse. Il élève seul son petit garçon avant de rencontrer une jeune femme tchèque qui donne naissance à leur fille Jana. Frère et sœur grandissent étroitement liés l’un à l’autre, entre les parents aimants et attentifs. Mais Jana ne se plie pas aux règles de l’école, préfère vagabonder en montagne et se fondre dans la nature. Ses extravagances deviennent inacceptables pour les habitants de la petite ville corsetée de Sainte-Croix.
Roland Buti situe le début de son roman dans les années cinquante lorsque les industries de haute précision mécanique sont florissantes. Il se termine à leur déclin, vingt ans plus tard. Entre les deux, Jana passe de l’enfance à l’âge adulte, avec un besoin croissant d’espace et de liberté, ce qu’à toute force la société veut corriger. Correction et mise au pas se veulent à la mesure des offenses : on interne celle qui se moque des convenances. Avec subtilité, l’auteur décrit l’impuissance des proches, ce qui les pousse à se rebeller, ou tristement se résigner et souffrir des séparations. Les petites boîtes à musique constituent le fond sonore de la narration, qui s’avance en souplesse à travers les ans, au fond des cœurs, dans ce pays vaudois où la nature à chaque saison et à chaque page déborde de beauté. (P.H. et C.A.)