En quelques brèves histoires, Jacqueline de Romilly fait part d’observations surprenantes relatives à des phénomènes mémoriels qu’elle a vécus. Ainsi la lecture d’un ouvrage écrit par un collègue d’université oublié, la mention du nom d’une ville espagnole, siège d’un meeting international auquel elle a participé longtemps auparavant, ou d’une étape d’un voyage familial datant de sa jeunesse provoquent chez elle une souvenance et une émotion d’une exceptionnelle densité. La reconstitution du fait initial avec une précision méticuleuse est source d’un tel émerveillement que, paradoxalement, elle peut lui faire douter de la réalité de certaines composantes. L’auteure cherche à expliquer ces manifestations dont elle ne veut voir l’origine ni dans un amoindrissement normal de certaines facultés dû à son âge ni dans les infirmités qui handicapent son existence. Elle y perçoit un accès à « autre chose », une ouverture à un « monde différent », qu’elle appelle « éternité » sans référence religieuse. L’illustre académicienne emploie dans son exposé et les conclusions qu’elle en tire une écriture d’une clarté, d’une précision pour décortiquer le flou propre à la mémoire qui ravira ceux qu’elle avait enchantés avec Dans le jardin des mots (NB juin 2007).
Les révélations de la mémoire
ROMILLY Jacqueline de