Irlandaise de dix-huit ans, Eily vient à Londres suivre des cours d’art dramatique, échappant ainsi à l’ambiance familiale. Elle rencontre Stephen, acteur confirmé, trente-huit ans. Ils deviennent amants, fument et boivent énormément, mais l’homme est manifestement détruit par un douloureux passé et leur liaison, quoique intense, est irrégulière. La révélation des origines de sa détresse et des atrocités subies et surmontées est rude pour la jeune fille… Eimear McBride (Une fille est une chose à demi, NB septembre 2015) dépeint dans un style particulier l’apprentissage amoureux, les traumatismes d’enfance et la difficile récupération. Elle s’attache surtout à rendre l’atmosphère libérée des années quatre-vingt-dix à Londres, la sexualité débridée et sans tabous dans le milieu des « théâtreux ». Quand les héros, qui sont amoureux fous, ne cessent de se brouiller, l’incompréhension est totale et seule la confession dramatique éclaire le contexte. Le plus émouvant est le chaos intérieur que l’écrivain révèle par son phrasé haché, fracturé, où des phrases inachevées suggèrent le pire ou le plus osé ! D’une modernité absolue, le récit peut dérouter et paraître exagéré. Un roman coup de poing très original, très cru, qu’on n’oublie pas. (S.La. et B.T.)
Les Saltimbanques ordinaires
McBRIDE Eimear