Quand on chante « Mon petit oiseau a pris sa volée », Nicolas croit que c’est la volée que son père lui administre régulièrement. Quand on cherche l’intrus dans des images représentant des familles, il identifie immédiatement un père qui joue avec son fils. Coupable désigné lors des bagarres où il reproduit la violence de son foyer, il veille par ailleurs sur ses amis imaginaires Petit Toiseau et les Fourmisseaux, leur reprochant leurs gros mots. Un jour, las des miettes de biscottes, les bestioles réclament des tartines de kétcheupe… Nicolas a cinq ans, il ne sait pas qu’il vit l’insupportable et sa seule thérapie c’est ce dialogue avec plus faible que lui. Son récit est émaillé de mots d’enfant, d’à peu près révélateurs : les chômières sont habitées par des chômeurs, le « Petit Poussé » ne pouvait manquer de l’être, benjamin comme lui d’une nombreuse fratrie, et « Lotrabruti » est un coureur cycliste, pas lui bien-sûr. Le texte est drôle même s’il laisse entrevoir beaucoup de difficultés à venir malgré la bonne volonté des enseignants qui réagissent à contretemps et ne comprennent pas tout. Et l’on craque pour ce Candide déjà mal parti, mal loti. Reste à savoir comment les enfants de 10-11 ans pourront s’identifier à un héros de cinq ans. Il faut du recul et une bonne maîtrise de la lecture pour apprécier les déformations du langage. Publié en 2000 chez Nathan sous le même titre.
Les tartines au kétcheupe
ROGER Marie-Sabine