Ă lâheure des soubresauts sanglants de lâindĂ©pendance, Albert Vandel, le plus gros colon dâAlgĂ©rie, entourĂ© de quelques-uns de ses semblables avec lesquels il contrĂŽlait le pays pour ou contre la mĂ©tropole, voit son monde sâeffondrer. Il attend lâapocalypse dans sa maison-forteresse de la Mitidja. LĂ , il dĂ©roule une fresque historique hallucinĂ©e oĂč il s’imagine revivre les Ă©tapes dâune colonisation ambiguĂ« depuis 1830. Il assume tout : conquĂȘtes, massacres, prĂ©dations, racisme, frĂ©nĂ©sie du profit, sur fond de bonne conscience civilisatrice, jusquâĂ lâimplacable retour des choses, car « il est trop tard ».
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Mathieu Belezi stigmatisait dĂ©jĂ lâaveuglement des grands colons dâAlgĂ©rie dans CâĂ©tait notre terre (NB aoĂ»t-septembre 2008). Il fait ici le procĂšs sans nuances de lâordre colonial. On peut souscrire en partie Ă son analyse, justifiĂ©e par lâhistoire, en regrettant que le destin de la masse des « petits » pieds-noirs en soit absent. Ăcrit dans une langue verte et percutante, ce roman aurait pu ĂȘtre Ă©laguĂ© de certaines pĂ©ripĂ©ties souvent rĂ©pĂ©titives, y compris les prouesses sexuelles obsessionnelles du hĂ©ros. Il aurait aussi mĂ©ritĂ© une construction moins alambiquĂ©e et plus ramassĂ©e.