Telle l’hydre de Lerne, la famille étouffe Cécile Wajsbrot quand son père, puis sa tante, tous deux émigrés juifs polonais, sont atteints d’Alzheimer. L’un, de naturel effacé et solitaire, se coupe encore plus du monde, l’autre divague. L’auteur doit se débrouiller pour organiser des gardes à la maison, tandis que le mal progresse inexorablement et que les exigences imprévisibles et déroutantes des malades minent sa vie personnelle.
Épuisée, au bord de l’abîme sans fin qui s’ouvre devant elle, elle rédige son journal pendant quelques mois. Ni mémoires, ni autobiographie, mais un reflet des moments vécus. On ne trouve pas ici un récit chronologique des faits, mais des réflexions sur le déracinement et la mémoire familiale marquée par l’exil, sur l’acte d’écriture, sur l’angoisse qui étreint à la fois le malade et le proche qui n’arrive pas à faire face. Tout cela mêlé à des réminiscences littéraires et musicales. Un texte profond mais peu accessible (cf. L’île aux musées, octobre 2008), une mise à nu sans concession, un témoignage qui marque.