Livre de chroniques IV

LOBO ANTUNES António

Comme il est triste, cet António Lobo Antunes, se dit-on ! Toujours la nostalgie d’une enfance irrémédiablement perdue, orgueilleuse et maladroite, habitée par l’angoisse de la mort. Toujours les ténèbres obsédantes laissées par les années atroces de guerre en Angola. Parfois, ses chroniques du quotidien deviennent de courtes nouvelles, et ce ne sont que ruptures, abandons, morts, tristesse d’existences routinières dans de pauvres décors. Cependant, le lecteur continue, prisonnier surpris, de plus en plus attentif aux avancées hésitantes du récit, aux brillants exercices d’écriture, aux lueurs d’humour, d’autodérision ; et à la poésie qui flotte autour de ces petites scènes de la vie courante, simples en apparence, doublées d’une puissance émotive détonante, jusqu’au dénouement qui laisse souvent méditatif. La présence discrète de proches – parents, amis – ajoute à la densité affective (la dernière chronique, sur la mort du père, en est exemplaire).Finalement, ces chroniques sont surtout l’histoire de la création d’une oeuvre (cf. Livre de chroniques, Livre du Mois, NB mai 2000), commencée à onze ans, substance de la vie de l’auteur : « Émissaire d’un roi inconnu/ J’accomplis d’informes instructions de l’au-delà », dit-il de lui-même en citant Pessoa…