Louange de l’ombre

TANIZAKI Jun'ichirô

À travers l’éloge du clair-obscur, spécificité de l’esthétique japonaise, le célèbre écrivain Jun’ichirô Tanizaki (Le chat, son maître et ses deux maîtresses, NB février 1995) dévoile un pan du mystère de l’âme de son pays, mis à mal par le modernisme occidental et son goût effréné pour la lumière, le brillant et le clinquant. Il vante le chatoiement des métaux patinés et des laques sombres traditionnelles, magnifié par l’architecture des maisons anciennes avec leur toit en auvent, leurs cloisons en papier, leurs recoins d’ombre et leur éclairage à la chandelle. La même philosophie imprègne bien des aspects de la vie japonaise, son théâtre (nô, kabuki ou bunraku), son art avec l’amour du jade, et jusque dans le teint mat de sa population… L’auteur exprime sa nostalgie d’une époque révolue, sans amertume et avec un humour léger qui sait aborder la trivialité. Écrit en 1933, ce court essai raffiné n’a pas pris une ride. (L.K. et P.B.)