L’ourso

CHABANE Merwan, ALAPONT David

Traversant la campagne endormie sous la neige, Mickaïl arrive à pied au village et se heurte à son frère Fédor parti chercher du bois. Ils ne se sont pas vus depuis 15 ans, depuis que leur père et leur plus jeune frère Alexeï ont disparu par la faute du terrible homme à tête d’ours : l’Ourso. L’animosité de Fédor pour son frère est patente : il lui reproche son absence, son manque de courage pour affronter  le monstre et venger leur frère. Il le convainc de partir avec lui  sur les traces du géant.  Le chemin à travers les sous-bois, dans la neige,  la boue et la glace, se révèle difficile et dangereux, mais offre aux deux frères l’occasion de se redécouvrir. La vie en commun, les rencontres avec d’autres chasseurs modifient leur état d’esprit. Peu à peu l’objet de leur vengeance perd de son importance, leur permettant alors d’orienter leur vie différemment et de retrouver la paix entre eux deux et au fond d’ eux mêmes.

Ce conte russe étrange et émouvant dessine une jolie fable sur la famille et la rivalité entre frères. Par petites touches, il sait camper avec finesse les personnalités des frères et les liens si différents qui les relient avec leur mère. Il réussit à décrire le cheminement complexe nécessaire pour débloquer chez Fédor le traumatisme vieux de 15 années. Une évolution intérieure mise en scène dans un univers où ils ne sont pas seuls à courir après le mythe : les chasseurs aussi sont en quête de leur proie idéale. Deux quêtes différentes animées par un graphisme à la fois simple et grandiose dans les paysages enneigés d’où émane une atmosphère intime et impressionnante : Du tapis feutré de la neige surgissent en se tordant les arbres de la taïga, tandis que l’air ambiant, presque liquide,  tourbillonne en longues volutes. Les visages anguleux et rudes sous le trait semi réaliste de D. Alapont laissent apparaître l’humanité des personnages devenus attachants.  Un bel ouvrage aux aplats de couleurs tendres. Dés 15 ans.