Ma grande

CASTILLON Claire

« Tu me faisais des brĂ»lures et je dĂ©brĂ»lais jamais. Je t’ai tuĂ©e et ça se fait pas. Je vais l’écrire et voilà
 ». DĂšs l’incipit sont donnĂ©s thĂšme et ton de la longue lettre sans rĂ©ponse d’un mari Ă  sa femme « Ă©vaporĂ©e ».   Claire Castillon (Rebelles, un peu, NB septembre 2017) mĂȘle encore ici deux profils mal assortis et autodestructeurs. Elle choisit de faire de ce courrier le constat factuel de la montĂ©e vers l’inĂ©luctable d’un couple durant deux dĂ©cennies. Vitriol et sensibilitĂ©, distance et familiaritĂ© colorent les mots couchĂ©s pour archiver efficacement les faits, sans rĂ©crimination, sans justification claironnĂ©es. Les phrases en sont ramassĂ©es et excluent nĂ©gation et dialogue. Possessive, narcissique, jalouse, impĂ©rative, Ă©goĂŻste, agressive et envieuse, la femme a dĂ©possĂ©dĂ© l’époux de lui-mĂȘme, l’a dominĂ©, aliĂ©nĂ©. Le lecteur bousculĂ©, mal Ă  l’aise, assiste impuissant Ă  cette lente rumination et doit reconnaĂźtre le talent de cette Ă©criture prĂ©cise et caustique : « je suis mieux quand tu n’es pas lĂ  mais je sais que j’avais pas le droit ». (C.R.P. et S.D.)