En 1862, Sofia Bers épouse le comte Tolstoï, écrivain déjà célèbre. Elle a dix-huit ans, lui trente-quatre. De 1904 à 1916, pour se rendre justice, elle rédige son autobiographie à partir de ses souvenirs, de journaux intimes et de correspondances. Très maternelle, elle eut treize enfants, cinq moururent jeunes. Copiste infatigable du maître, elle entretint avec son génial et paradoxal époux des relations conjugales tumultueuses, soigna et éduqua sa famille, gérant sa maisonnée et le domaine de Iasnaïa Poliana, tout en menant la vie d’une aristocrate de l’époque.
Sofia, très amoureuse, écrasée par son époux, se peint en femme irréprochable et séduisante. Complaisant, le portrait irrite ; il touche aussi, par la tendresse, le goût de la nature, la fraîcheur. L’oeuvre et la personnalité de Tolstoï en occupent le centre : une manne littéraire, éditée seulement aujourd’hui en Russie, qui permet de suivre la pensée inquiète de l’écrivain, de saisir des aspects – subjectifs – d’une intimité conjugale complexe. Détaillée, colorée, la vie quotidienne de l’étonnante famille suscite naturellement l’intérêt, mais que de maladies soignées, d’états d’âme explorés, que de noms et diminutifs ! Un index, un arbre généalogique secourent le lecteur, deux cahiers de photos, souvent prises par Sofia, le délassent…