« Je crie parce que jâai peur ». Lâenfant qui raconte crie sur le pont. Il crie parce quâil a peur : mamie perd ses mots avant de perdre la main, de perdre pied, de perdre la tĂȘte⊠Sur le pont devant lui, elle en cherche un, la bouche ouverte comme un O. Alors lâangoisse sâempare de lâenfant. OĂč vont ces mots Ă©garĂ©s ? Peut-ĂȘtre dans la CitĂ© des mots perdus, lui dit-on. Certains disparaissent Ă jamais mais dâautres reviennent sans quâon sây attendeâŠ
Les troubles de la mĂ©moire, la perte du langage, un des maux du siĂšcle vieillissant, est au cĆur de cet album qui dĂ©dramatise le sujet par sa mise en scĂšne et des jeux de mots certes faciles mais bien amenĂ©s. En deçà ou au-delĂ de la parole, quand les mots sâĂ©tranglent, reste le cri, expression de lâangoisse devant lâinconnu ou lâinĂ©vitable. Câest la rĂ©action de lâenfant. Le parallĂšle, du coup, est difficile Ă admettre avec la toile de Munch qui associe acrobatiquement les deux thĂšmes ; le pont qui traverse lâimage et la palette proche de celle du tableau suffisent-ils ? Lâhistoire impose des images autres que le seul point de vue du tableau quâon dĂ©couvre, ainsi introduit, Ă la fin de lâalbum. (C.B)