La journée, Manu, marin-pêcheur, travaille dur : il vide des maquereaux à bord d’un chalutier ; le soir, il joue comme un forcené au football et, la nuit, il fait traverser la Manche à des migrants transis. Le reste du temps il boit trop et fume trop. C’est sans doute pour oublier son enfance difficile et son frère Julien disparu… Dans ce premier roman, Quentin Desauw réussit à camper en quelques pages un personnage attachant, ballotté par la vie moderne, qui tente désespérément de s’accrocher à quelques réalités tangibles pour ne pas sombrer. Avec une poésie des mots du quotidien, par petites touches délicates et superposées, l’auteur peint un monde contemporain sans fard, où la solitude est souveraine. Les descriptions de la lumière froide du Nord répondent à celles d’un jeune homme qui s’oublie dans l’alcool : la frontière entre la bonne et la mauvaise direction que prend une vie se dilue lentement ; la marée haute du désespoir peut engloutir si on ne réagit pas. Ces jolies pages tristes rendent compte des rêves ratés d’une jeunesse occidentale un peu perdue, mais qui veut y croire encore. Et nous aussi. (B.Bo. et C.-M.T.)
Marée haute
DESAUW Quentin