Margot

ROBIN Fanny, VAUTE Delphine

L’indicible est suggéré en images oniriques et en phrases suspendues. « Elle a les yeux bleus, Margot » dit le narrateur de cette étrange histoire dans un monologue qui instille l’inquiétude au fil des pages. Dans les dernières lignes, l’inéluctable : « Tu disparais derrière l’horizon. » Voilà pour le récit : des phrases syncopées disent l’âge des enfants, leur insouciance, leur imprudence, l’affection qui les unit. L’émotion à gorge nouée est d’abord mise à distance par le jeu d’une écriture faussement impersonnelle ; le constat navré de la dernière phrase imposant la réalité rompt les digues. Cette Enfant de la haute mer à la manière de Supervielle, est dessinée d’un simple trait, dans une mise en scène déréalisée qui évite le pathos : seul le mouvement de la chevelure mouillée dessine l’immersion. Tel cadrage aussi qui inverse la perspective. Sans parler du bateau en papier, signe d’enfance et de fragilité. La force de cet album est dans le détail du texte et de l’image qui permettent à chacun de lire l’histoire qu’il peut entendre. « Petits arrangements avec la mort » qui nécessitent une lecture préalable de l’adulte.