1909. Montmartre reste un village mal famé, riche en pauvres, ivrognes, prostituées, anarchistes et artistes. Parmi eux, Théophile Steilen, célèbre pour ses dessins – dont l’affiche du cabaret Le Chat noir en 1896 -, vieillit et manque d’inspiration. Or une nuit, Vaillant, un matou intraitable, guide jusqu’à son atelier Masseïda, jeune Noire très belle, perdue et affamée. Elle vient de chanter au Lapin agile, bouleversant les spectateurs disparates, du souteneur violent au préfet de la Seine venu incognito. Elle devient rapidement la gouvernante et le modèle du peintre. Mais 1914 approche… Ce troisième roman de Julien Delmaire (Frère des astres, NB mai 2016) est bien documenté – Steilen et Masseïda ont existé…Attention cependant aux avalanches de noms de personnages connus et de rues de la Butte ! Mais l’écriture de ce jeune auteur, également poète, est originale et son intrigue linéaire s’affranchit de la banalité grâce à de belles métaphores inattendues et fortes, dans tous les domaines : une pauvresse est une « pomme de terre épluchée par la lame du vent …Sur l’ardoise des toits l’eau chantait la ritournelle des fées impudiques… Les pauvres se tricotaient à mains nues des lambeaux de dignité…». Un récit vif et agréable. (D.C. et M.-C.A.)
Minuit, Montmartre
DELMAIRE Julien