Monsieur Bovary.

BILLOT Antoine

Selon Antoine Billot, Monsieur Bovary, présenté par Flaubert comme un bourgeois lourdaud, cocu ridicule et médecin falot, peut être vu sous un autre angle. L’auteur imagine une version différente du drame et, en passant l’oeuvre au crible, montre que Flaubert a épousé aveuglément le point de vue de la belle et jeune Emma Bovary. Charles apparaît ici comme un homme fin, blessé par les moqueries de condisciples plus policés à Rouen, l’abandon d’une femme aimée et un premier mariage décevant. Éperdument amoureux de son épouse insatisfaite, il la préfère infidèle mais heureuse plutôt que de la perdre. Il accepte consciemment puis favorise cyniquement les amours scandaleuses d’Emma, délaisse un métier qu’il aime et s’endette en pure perte.  L’analyse psychologique est fine comme dans Le désarroi de l’élève Wittgenstein (NB juillet 2003), la thèse paradoxale. Le héros, vu de l’intérieur, est un être double, complexe, mais Charles, idéaliste et sensible, est peu à peu étouffé par Bovary, manipulateur sans illusions, artisan de l’intrigue et non dupe. Un livre audacieux, bien écrit, qui veut donner les couleurs actuelles à un ancien chef-d’oeuvre.