Dans un village au bout du monde, où ne passe personne sinon, parfois, un colporteur aveugle, vivent Pa, Ma, et Otto, le jeune narrateur. L’arrivée du Cirque d’Érêves est un événement et le clou de son spectacle, annoncé au porte-voix, le Monstre d’Érêves et son dompteur, va bouleverser la vie de Cœur de Piaf, ainsi surnommé par les galopins du village.
Images et texte, comme dans un roman graphique, construisent ce roman dans un équilibre parfait pour créer le suspense, le maintenir et, en même temps, semer des indices qui devraient mettre le lecteur sur la voie. Car le monstre, dans sa cage, est un bel enfant au visage craquant ; Otto qui le regarde, de l’autre côté des barreaux, le visage couvert de poils, son double au pays des monstres que sont tous les villageois installés dans les gradins. Coup de théâtre garanti pour le lecteur inattentif qui n’a pas remarqué, par exemple, qu’Otto n’est jamais présenté que de dos avant le nœud de l’intrigue etc… L’histoire d’amitié qui se développe ensuite entre les deux personnages introduit une réflexion classique sur le rapport à l’altérité, à l’exclusion et permet de tisser des liens avec des pages peu glorieuses de notre histoire. Reste que l’essentiel est le plaisir qui naît d’une narration à quatre mains, en noir et blanc, aussi belle qu’expressive et astucieuse. Superbe ! (C.B et J.G)