Mousseline la Sérieuse

YVERT Sylvie

Fille de Louis XVI, Marie-Thérèse-Charlotte de France, Madame Royale ou duchesse d’Angoulême, a porté d’autres noms en exil, mais sa mère autrefois l’avait surnommée Mousseline la Sérieuse pour son caractère intransigeant. Jusqu’à la prise de la Bastille, elle a une enfance choyée au Château de Versailles. Puis advient la sanglante période révolutionnaire. Devenue Thérèse Capet, elle subit à l’adolescence trois ans et demi de réclusion dans la prison du Temple dont une année d’isolement total dans le froid, la pénombre, après la mort de tous les siens. Envoyée en Autriche dans sa famille maternelle impériale en échange de prisonniers, ensuite prise en main par ses oncles paternels, Marie-Thérèse épouse son cousin le duc d’Angoulême sans lui donner d’héritier. Après une succession de pérégrinations à travers l’Europe, elle retrouve la France avec Louis XVIII, puis repart pour un nouvel exil. Princesse errante, elle meurt loin de sa patrie, rêvant du trône de France pour son neveu. Sylvie Yvert imagine cette femme à Venise en 1850 rédigeant ses mémoires au soir de sa vie mouvementée. Elle se base pour cela sur des faits authentiques, le journal écrit par Madame Royale au Temple et de nombreux témoignages de cette époque, comblant les quelques vides grâce à l’empathie qu’elle éprouve pour son personnage, figure particulièrement émouvante et énigmatique. Très joliment écrit – mais sans outrance – dans une langue proche du XVIIIe siècle, ponctuée de tournures élégantes, cette reconstitution historique analyse avec subtilité une personnalité jugée trop taciturne par ses contemporains. Comment en aurait-il pu être autrement après une jeunesse confisquée marquée de drames et quarante années d’exil ? Et pourtant, cette princesse pieuse, généreuse, intelligente, digne et énergique, fut saluée par Napoléon, son adversaire, comme « le seul homme de la famille ». Beaucoup plus qu’un simple roman historique, une lecture très éclairante et prenante. (E.B., M.S.-A. et C.G.)