Avec son Grand-Larousse illustré et celui du savoir vivre, une étudiante en cinéma, fraîchement débarquée de Sofia, rêve d’une France comme dans le film d’Amélie Poulain. La demande de caution de la Dame de la Préfecture pour l’obtention de son « laissez-pisser » et la vie quotidienne dans la capitale des Gaules la font vite atterrir. Sa congénère Dora quitte la Bulgarie turque pour un avenir meilleur et devient, malgré elle, travailleuse du sexe pour un proxénète. Lors d’une garde à vue, leurs destins se croisent, l’étudiante joue le rôle de traductrice.
De son écriture inventive et malicieuse, l’écrivaine, cinéaste et performeuse, Elitza Gueorguieva, déjà lauréate SGDL pour son premier roman, apporte une fraîcheur décalée aux récits d’émancipation de deux femmes bulgares. Leurs péripéties face à la réalité de l’immigration sont plurielles et loufoques sans être sordides. Dans un récit à la deuxième personne, rempli d’anecdotes truculentes, de listes d’objectifs aussi pertinentes que réalistes, la Bulgare, installée depuis dix-sept ans en France, se remémore son expérience et l’entrelace habilement avec des récits recueillis auprès d’associations de prostituées. Elle réussit avec talent à transformer les clichés pour que ces découvertes et désillusions deviennent une ode à la liberté. Détonant et instructif ! (S.D. et B.T. )