Oeuvres vives

LÊ Linda

Un jeune journaliste parisien fait un reportage au Havre. Il y lit par hasard un livre d’un certain Antoine Sorel qui le bouleverse par sa sombre profondeur. Lorsqu’il apprend par les journaux locaux que cet écrivain de quarante-cinq ans vient de se suicider, il entreprend de le faire revivre à travers une biographie. Il recherche la famille du suicidé : un frère, affectueux, un père, ignoble, fils honteux d’un paysan nord-vietnamien réquisitionné en France en 1939 pour le travail forcé. Il rencontre quelques amis d’enfance, admiratifs, et quelques femmes aimées… Le dénuement et un alcoolisme croissant ont accompagné une existence désastreuse. La platitude du style et les nombreuses expressions françaises « pur sucre » surprennent chez Linda Lê (Par ailleurs (exil), NB octobre 2014). Le traitement uniforme des interviews aplanit leur relief. Les interrogations, atermoiements, constats d’impuissance du journaliste obsédé par son personnage s’intercalent en ritournelle lancinante. Et de bars en cafés, l’ennui « percole ». Cependant, l’admiration du narrateur pour son écrivain maudit, sa manière de s’approprier la ville, autre personnage majeur où vécut son héros, la qualité d’émotion de certains témoignages font que ce livre bizarre ne s’oublie pas si vite.