Passer le pont

PETERSEN Pia

Récemment licenciée à l’instigation de ses collègues, Kara désemparée subit progressivement l’ascendant tyrannique et l’emprise impitoyable de Nathan, ancien psychanalyste. Dépossédée de tout, isolée psychologiquement dans une communauté confinée, elle succombe au charisme du chef, tout en repoussant ses avances. Cruel, ce dernier crée et détruit les couples dans son microcosme, causant suicides et dépressions. Accusée violemment, affamée, Kara mène une existence sordide, mendie et vole, accepte avec docilité de travailler, finit par nouer d’autres liens et retrouver un embryon d’esprit critique. La société dont la surconsommation aliénante la dégoûtait est préférable à l’enfermement et à la pornographie sadique.  Ce récit introspectif décrit bien l’espionnage mutuel, le climat angoissant de la secte, les multiples contradictions et la capacité de souffrance d’une femme réagissant instinctivement mais tardivement au tyran qui les hypnotisait et les détruisait tous. Si les constants retours en arrière nécessitent une lecture attentive, le style rapide et incisif et la force d’évocation appréciés dans Une fenêtre au hasard (NB août-septembre 2005) rendent la lecture poignante.