Elle a les mots justes pour le dire. Ou plutĂŽt la dire, cette maladie qui confine Ă la folie, celle de son pĂšre. En vingt-six courts chapitres, dĂ©clinant un alphabet aussi hĂ©tĂ©roclite quâinattendu, GwenaĂ«lle Aubry tente de recueillir les miettes Ă©parses de la vie de cet homme absent de lui-mĂȘme, dĂ©construit par une psychose maniaco-dĂ©pressive. Puis, souvenir aprĂšs souvenir, caillou aprĂšs caillou, elle retrace le chemin qui lui permet de « sculpter lâabsence », de percer « lâopacité » de cet Ă©minent professeur de droit qui ne vĂ©cut que par intermittences, passant, au rythme des chutes et des rechutes, de la Sorbonne au trottoir, rejetĂ© par sa trĂšs bourgeoise famille.
Â
Ce rĂ©cit fragmentĂ©Â â autofiction de toute Ă©vidence â poignant, Ă©mouvant, est un vĂ©ritable chant dâamour au pĂšre, un hommage filial tout empreint de tendresse, de mĂ©lancolie, de remords, de regrets. Il dit toute la douleur, la souffrance, le dĂ©sarroi quâengendrent pour lâintĂ©ressĂ© et pour son entourage les dĂ©sordres dâune maladie psychiatrique. Il dit lâindicible : la tristesse, la honte, lâimpuissance, les faiblesses, les lĂąchetĂ©s, les incomprĂ©hensions face Ă la maladie. Il est vibrant dâhumanitĂ© et de vĂ©ritĂ©.