Personne ne me verra pleurer

RIVERA GARZA Cristina

Comment devient-on folle, ou photographe de fous ? Joaquin, solitaire, insomniaque et morphinomane, s’est toujours caché derrière son appareil photo. En 1920, devenu le photographe officiel d’un asile psychiatrique de Mexico, il reconnaît dans l’une des pensionnaires Matilda dont il possède déjà un cliché pris lorsqu’il travaillait pour le recensement des prostituées de la ville. L’enquête qu’il mène sur elle l’emmène plus loin qu’il ne l’aurait imaginé. L’atmosphère étrange de ce roman, due à la marginalité des personnages, envoûte et dérange à la fois. Cristina Rivera Garza navigue avec virtuosité et âpreté entre la folie de Matilda – inspirée d’un personnage ayant existé –, l’enfermement du photographe, la mort et la réalité. Revisitant le passé de ces deux blessés de la vie, ayant traversé la Révolution chacun reclus dans son monde, elle nous entraîne dans un pays en pleine mutation. La construction compliquée, les innombrables digressions et références à des noms et des événements peu familiers nuisent toutefois un peu au langage poétique de cet ouvrage évoquant l’instabilité des êtres et un Mexique profond et révolu.