Celle qui parle d’abord est une vieille femme qui habite la dernière maison du village, en lisière de la forêt dans laquelle elle ramasse le bois pour se chauffer, braconne et glane de quoi se nourrir. Décrivant sa décrépitude physique sans complaisance, elle vit en marge, dans une solitude et un dénuement revendiqués jusqu’à se défaire de son nom : « je ne veux plus qu’on m’appelle Marceline, ni autrement. Je veux plus qu’on m’appelle ». Lorsque Yann, 18 ans, « français juif », la rencontre dans la forêt, un dialogue rugueux s’instaure ; le jeune étudiant y voit un sujet d’étude pour son mémoire de sociologie sur « la marginalité rurale » en ces années 60. Bien des années plus tard, professeur reconnu et père de famille, Yann reprend la parole …
Plus loin mais où est le dernier roman de Béatrice Beck (1914-2008), publié initialement en 1997. Dans ce texte -émouvant, direct, caustique- en deux parties et deux temporalités, elle traite de l’antisémitisme, du racisme, du rôle de la religion, du sentiment de classe, avec en filigrane l’omniprésence du passé. Même si on comprend bien le propos, cette seconde partie peut laisser dubitatif. Tout ça pour ça ? Reste « la patte stylistique » de son auteure et le très intéressant travail pictural de Vincent Bizien, avec ses figures grotesques, mystérieuses et fragiles. À découvrir ! (M.T.D. et P.E.)