Ă trente-trois ans, Estela a quittĂ© sa mĂšre et le sud du Chili pour la capitale, Santiago, oĂč elle est la bonne dâun couple aisĂ©Â ; il est docteur, elle est avocate. Une petite fille naĂźt Ă son arrivĂ©e et Estela sâen occupe. Ă lâĂąge de sept ans, une nuit, lâenfant se noie dans la piscine de la maison.
Le nouveau roman de lâĂ©crivaine chilienne Alia Trabucco ZerĂĄn porte lâempreinte de son originalitĂ© pour lâĂ©criture (La soustraction, Les Notes fĂ©vrier 2020), sur le thĂšme de la servitude pourtant souvent traitĂ©. La narratrice sâadresse crĂ»ment Ă ceux qui lâinterrogent sur le dĂ©cĂšs de la fillette. Elle raconte ses sept annĂ©es de bonne Ă tout faire et quelques souvenirs dâenfance. Car pour elle tout est liĂ©, chaque dĂ©tail, parole, pensĂ©e, Ă©vĂ©nement a un impact sur le dĂ©roulement des faits et leur issue. Sa vie routiniĂšre est une forme dâesclavage moderne dans un pays oĂč couve la rĂ©bellion. MĂȘme si les patrons semblent apprĂ©cier leur employĂ©e, leur attitude est teintĂ©e de mĂ©pris. Lâangoisse et la solitude habitent tous les personnages lestĂ©s de secrets. Leur caractĂšre est subtilement dĂ©crit Ă travers les yeux de la narratrice lucide. Lâautre sujet central est la mort inĂ©luctable ; le dĂ©cĂšs de lâenfant est connu dĂšs la premiĂšre page, mais nous ne savons jamais ni quand ni comment survient lâinĂ©vitable. LâintĂ©rĂȘt et lâĂ©motion sont soutenus de la premiĂšre Ă la derniĂšre page de cette tragĂ©die. (L.K. et L.G.)