Qui a peur de l’imitation ?

« Tous des voleurs ! » Comment l’écrivain pourrait-il ignorer l’océan scintillant de la littérature, ses fascinants modèles ? Mais les censeurs sont là, sourcilleux : influence ou imitation ? Plagiat ou adaptation ? Les idées peuvent circuler, mais on ne vole pas les mots. L’écrivain s’inquiète de ses emprunts clandestins. Et son Moi souffre dans sa quête identitaire. L’adresse du larcin, la grandeur de l’oeuvre choisie cautionnent le délinquant. Les Anciens ont du reste été longtemps les modèles obligés. Mais les grandes oeuvres n’ont-elles pas elles-mêmes imité ? La source primordiale n’existe pas. La subtilité de Maxime Decout pousse l’exploration du thème jusqu’au vertige. Lecteur érudit, essayiste virtuose, il envisage tous les cas de figure, écrivant lui-même un pastiche « non sans maladresses et ficelles théoriques grossières », annonce-t-il en débutant. Ces retenues paraissent ironiques à la lecture de ce brillant essai d’histoire littéraire, aussi dense par son contenu que par sa typographie, qui fait de l’imitation un pont tendu entre le lecteur et l’oeuvre. (M.W. et A.Le.)