Suji passe beaucoup de temps Ă la fenĂȘtre de son appartement depuis quâun accident lâa rendue tĂ©traplĂ©gique. Le spectacle de la rue, vu de trĂšs haut, comme en plongĂ©e, change au fil des heures, des jours : les tĂȘtes des passants, un jeu de marelle dessinĂ© sur le sol, un cerf-volant vu du dessus, un chien en laisse, des parapluies⊠à elle de dĂ©chiffrer ce mouvement « de fourmis » dont elle est exclue. Un jour, un petit garçon lĂšve la tĂȘte.
Une histoire : celle de la rencontre de deux enfants sĂ©parĂ©s par le handicap . LâĂ©pilogue heureux tient dans le dĂ©tail de la derniĂšre page oĂč la couleur fait son apparition, oĂč un fauteuil roulant attend dans la rue que la fillette y trouve sa place pour regarder dâen bas cerf-volant et ballons rouges ! Une rĂ©flexion sur le handicap, pudique, efficace : que voit-on quand on est handicapĂ©, que voient les autres ? IdĂ©e superbe : les enfants dans la rue sâallongent par terre pour voir Suji, pour quâelle les voie. Premier regard croisĂ©, le contact se noue et rien nâest insurmontable : on invente, comme du morse, un langage des corps. Ă relire cet album original, quelque peu dĂ©routant, dâautres dĂ©tails surgissent, prĂ©cis et dĂ©licats, qui en font le charme. (C.B.)