Salina : les trois exils

Un cavalier venu du fond de l’horizon parvient au caravansérail de la tribu Djimba et dépose à terre un nouveau-né hurlant ; l’enfant, épuisée, est recueillie par une vieille femme qui la prénomme Salina. Adoptée par le village, elle est promise au fils aîné du chef alors qu’elle aime le cadet. Forcée par son mari, elle accouche d’un fils qu’elle élève sans amour et, en représailles, ne porte aucun secours à son mari blessé dans une bataille. Bannie, elle est condamnée à errer dans le désert.   De la pièce de théâtre, écrite en 2003 et reprise en plusieurs occasions, Laurent Gaudé (Écoutez nos défaites, NB octobre 2016) a élaboré un roman magnifique, un triptyque en forme de conte africain où des héros dignes d’une tragédie antique s’affrontent avec un souffle épique. Situé dans un pays imaginaire et désertique, il crée le cadre d’une vie autarcique soumise à la rudesse d’un climat qui exacerbe les sentiments et les incessantes luttes de clans. Il raconte la condition féminine soumise aux volontés masculines, l’amour contrarié et violé et l’humiliation qui alimente un désir fou de vengeance. Après des décennies de malheurs, l’apaisement vient de femmes compatissantes qui réparent l’injustice. (M.R. et M.Bo.)