Dans une peinture réaliste, au noir et blanc angoissant, Loyer met en scène une page d’histoire de l’industrie du charbon au début du XIXème : la catastrophe minière de Courrières en mars 1906. Luttes sociales, attitude des politiques, importance de la presse…
Le 10 mars 1906, à Courrières, les galeries d’exploitation du charbon explosent. Le feu s’étend, les gaz envahissent les boyaux. Sur les mille huit cents hommes descendus dans la mine, il y aura mille quatre vingt dix neuf morts dont deux cent quarante deux enfants. C’est cette tragédie que fait ici revivre Jean-Luc Loyer en la replaçant dans son contexte historique : l’importance de l’essor industriel, le fort développement de l‘industrie du charbon et, en conséquence, la croissance des villes et l’arrivée de nouvelles populations. Il faut en effet une main d’oeuvre abondante pour sortir le minerai. Malgré les lois sociales, les enfants descendent dans la mine dès l’âge de 12 ans, les journées sont de 12 heures… « La France a besoin de son charbon ». Le 6 mars le feu couve dans les galeries et les murs construits pour l’étouffer sont inefficaces. La tragédie éclate le 10 mars.
À travers la vie de quelques personnages-prétexte, Jean-Luc Loyer bâtit un documentaire en hommage aux disparus. Il laisse la parole aux « rescapés » (terme apparu pour la première fois dans la presse à cette occasion), dépeint les luttes sociales consécutives au drame, l’attitude des politiques, la nouveauté de l’importance de la presse. Surtout il donne leur place aux absents tous cités en caractères gras symboliquement placés au milieu, au coeur, de ce livre-mémoire. En noir et blanc, ombrés jusqu’à l’angoisse, les dessins créent un monde réaliste et souvent très violent ; les chevaux brûlants dans la chaleur du feu rappellent celui de Picasso dans Guernica. Un beau témoignage plein de retenue.