Saveur coco

La pluie n’est pas tombée depuis des lustres, le soleil est accablant. Mourant de soif, une cigogne filiforme coiffée d’un sombrero, flanquée d’un renard candide, quittent leur maison à la recherche d’eau, ou d’un nuage. Ils marchent ou plutôt errent dans le désert hostile, aride et brûlant. Sauvés, un estaminet est en vue… mais il disparait. La dépression s’installe et malheureusement elle n’est pas climatique ! La nuit tombe, les deux compères découragés aperçoivent un poisson volant ; s’ils le suivent, ils vont sûrement trouver de l’eau.  Jiri a des doutes, Pôlka s’entête…

Conte onirique, fable philosophique, voici les aventures totalement absurdes de deux protagonistes atypiques et touchants. Leurs improbables rencontres (des poissons volants, un hippocampe borné, une autruche miniature, une pieuvre facteur etc.) pimentent le surréalisme des péripéties. La saveur de cette incroyable traversée du désert réside aussi dans l’esthétisme du traitement graphique et de la composition. Le trait est fin, soucieux du détail, l’anthropomorphisme saisissant ; cadrage et découpage obéissent au parti pris hautement fantaisiste. Des enluminures d’inspiration mexicaine agrémentent les planches. La langue élégante se joue des mots avec brio. Il émane une grande poésie de ce récit initiatique, cette quête illusoire et désespérée pétrie d’humour et de non-sens. Savoureux.