« Ce que je veux être plus tard ? Devenir enfant ! » rêve Bisou, la narratrice. Depuis la mort de son père, son enfance lui échappe. La mère, dépassée, a confié ses enfants à la DASS. Quand elle parvient à les récupérer, elle installe sa famille à la Cour des Miracles. Le logement est sordide, mais son emploi de serveuse ne lui laisse guère le choix. Pour supporter la pauvreté, le manque d’amour, les terribles assiduités du beau-père, Bisou choisit de se taire, mais écrit son malheur sur de multiples bouts de papier pour ne pas lâcher prise.
L’auteur (Princesse d’ailleurs, NB mars 1997), d’un trait nerveux et sans apitoiement inutile, dresse le terrifiant portrait d’une enfance réduite en miettes. Bisou, l’orpheline de père, trop tôt mûrie, n’attend aucun soutien de la mère infantile qu’il faut consoler et de la grand-mère ruinée, personnage pittoresque qui continue à jouer les grandes dames au milieu du chaos. Elle se réfugie dans l’écriture pour dire la terreur de l’abandon, l’horreur qu’inspire le beau-père. Catherine Enjolet, très engagée auprès des enfants victimes, a choisi elle aussi la littérature pour attirer l’attention sur leur sort. Ses mots justes et forts, son indignation maîtrisée servent bien leur cause..