Gianni est scĂ©nariste Ă succĂšs. Sa carriĂšre est Ă son apogĂ©e lorsquâune interview, en apparence anodine, se transforme en bombe sur les rĂ©seaux sociaux lorsquâil a le malheur de prononcer ces trois mots au sujet dâune personne fictive : « Stacy est bonne ». CollĂšgues et amis prennent leurs distances, son public lui tourne le dos. Toute sa vie est remise en question.
En inventant lâhistoire de Stacy, enlevĂ©e, droguĂ©e, chargĂ©e dans une fourgonnette et emportĂ©e dans le sous-sol dâun vieux bĂątiment abandonnĂ©, Gianni nâavait vraiment pas idĂ©e du dĂ©luge dâennuis qui allait lui tomber dessus. Alors, peu Ă peu, pour y faire face, « lâancien » Gianni cĂšde la place Ă un alter-ego malĂ©fique de moins en moins tolĂ©rant, deux facettes dâun mĂȘme homme au bord du prĂ©cipice.
Un livre acerbe, qui invente les codes de la narration, perd le lecteur dans les mĂ©andres de lâinconscient de Gianni de sorte que lâon ne sait plus ce qui est vrai ou faux, passĂ© ou prĂ©sent, folie lĂ©gĂšre ou pulsion meurtriĂšre. Stacy est construit comme un thriller trĂšs Ă©laborĂ© qui entretient lâincertitude par la multiplication des rĂ©cits autour de la rĂ©alitĂ©.
Une descente aux enfers exĂ©cutĂ©e brillamment qui nous fait penser â entre autre du fait de cette dualitĂ© du hĂ©ros, mi-homme, mi-dĂ©mon – Ă Fight Club. Mensonge, vĂ©ritĂ©, illusion et rĂ©alitĂ© sâentremĂšlent et se disloquent et dĂ©noncent au passage les travers des rĂ©seaux sociaux et les ambiguĂŻtĂ©s de notre sociĂ©tĂ©.
Ce roman graphique noir alterne scĂšnes dramatiques et hilarantes, avec un dessin dâune grande expressivitĂ©, au plus prĂšs des personnages. On en ressort mal Ă lâaise, mais titillĂ© comme si lâon devenait nous-mĂȘmes victimes coupables de la folie de Gianni. Et quâon accompagnait impuissant le passage Ă la mĂ©chancetĂ© du « hĂ©ros ».
(MC)