Sur les traces du serpent

Une construction solide, hardiment charpentée, truffée de rebondissements rocambolesques, des atmosphères joliment surannées mais d’un indéfectible pouvoir évocateur justifient pleinement la réédition de ce livre de Mary Elisabeth Braddon. L’auteure est parfois présentée comme « l’Agatha Christie » de l’ère Victorienne. Il flotte en effet un climat réellement prenant et suggestif dans le théâtre des péripéties : le Slopperton, le Londres, le Paris de l’époque. Les intrigues s’articulent, inventives, les morts se multiplient, pathétiques, pistes et fausses pistes se télescopent et s’enchevêtrent, labyrinthiques. Et M. Peters, précurseur attachant, obstiné et inflexible d’Hercule Poirot, joue les détectives contre vents et marées. Plausible. Mais la réelle épaisseur des personnages est parfois mise en défaut par un manichéisme quelque peu caricatural. Ce dualisme plutôt facile des psychologies et des situations donne trop vite au lecteur la prescience du dénouement. Pourtant, il poursuit sa lecture sous le charme de ce style panaché, actuel et désuet.