Sympathie pour le démon

CARVALHO Bernardo

Un homme, surnommé le Rat, travaillant pour des ONG sur des zones de conflit, est choisi pour livrer une rançon en échange de la liberté d’un otage menacé de décapitation. Arrivé sur les lieux, victime d’un attentat, il se souvient d’une relation passionnelle et charnelle avec un jeune homme qu’il surnomme le chihuahua. Cet homme séducteur et pervers l’a entraîné dans une véritable descente aux enfers dont le Rat essaie de comprendre les mécanismes…  Pour parler du mal et de la violence, Bernardo Carvalho (Reproduction, NB mai 2015) commence son livre comme un roman d’espionnage, en résonance avec l’actualité : conflits aux Moyen-Orient, attentat à Paris. Puis le roman bascule dans une étude psychologique très fouillée sur la violence du désir et le processus d’aliénation et d’anéantissement de l’ego d’une victime choisie. D’admirables pages dissèquent cette forme de passion amoureuse qui s’assortit de perversion, mensonge et manipulation jusqu’à la soumission et la dépendance. Comme une arme de guerre. Rappelant les fables, les noms parodiques des personnages (le Rat, sujet d’expérimentation, le chihuahua, frêle et rusé) créent une distance judicieuse qui favorise le regard d’anthropologue de l’auteur sur ces relations toxiques et ambiguës. Ce livre brillant et dense demande rigueur et concentration. (B.Bo. et Maje)