Pour surmonter leur mĂ©sentente, Luisa et Melvil sâoffrent un voyage en Sicile. AprĂšs l’atterrissage Ă Catane, ils se dirigent vers Taormine et lâhĂŽtel quatre Ă©toiles oĂč ils ont rĂ©servĂ© une chambre. Alors quâils roulent de nuit, sous une pluie battante, sur un mauvais chemin de terre, lâavant droit de leur voiture de location subit un choc violent. Animal, bloc de bĂ©ton, autre chose ?… Mais sans sâarrĂȘter, ils continuent leur route.
Ce voyage, qu’un accident va transformer en cauchemar, est racontĂ© par le mari qui rapporte de son point de vue les propos de sa femme, munie, elle, de lâindispensable guide touristique. Alors que se rĂ©vĂšlent progressivement la veulerie et le cynisme du narrateur et les faibles vellĂ©itĂ©s de contestation de son Ă©pouse, ils tombent sous lâemprise dâindividus variĂ©s encore plus retors quâils ne le sont eux-mĂȘmes. Yves Ravey (Trois jours chez ma tante, Les Notes octobre 2017) excelle Ă ciseler avec une extrĂȘme Ă©conomie de moyens, un rĂ©cit noir dans lequel se jouent les questions de responsabilitĂ© et de culpabilitĂ©, avec en arriĂšre-plan – quoique jamais dĂ©crite – la Sicile touristique, ses agents et les migrants aperçus au loin. Virtuose de la narration Ă©purĂ©e, lâauteur fait monter lâangoisse tout en laissant une fin ouverte Ă la catastrophe prĂ©vue. Saisissant ! (C.P. et P.L.)