Depuis plus de trois ans, Jörgen, soixante ans, ex-conseiller éditorial, vit seul avec Tirza sa fille cadette dans un quartier aisé d’Amsterdam. L’aînée a quitté la maison. L’épouse a rejoint un amant sur une péniche. Jörgen habite intensément son rôle de père d’enfant jugée surdouée. Avec une adoration un peu totalitaire, protectrice, possessive, didactique, perplexe. À la fête de ses dix-huit ans Tirza présente son ami marocain Choukri. C’est avec lui qu’elle part faire la remontée de l’Afrique, lui en qui Jörgen voit le double repoussant de Mohamed Atta, le terroriste du 11-Septembre… Il y a quelque chose d’incantatoire dans la dynamique lentissime de l’ouvrage sombre de Arnon Grunberg (Le Bonheur attrapé par un singe, NB février 2008). Né de constants retours en arrière, de récurrences volontaires, d’une plume explicite jusqu’à la redondance à l’image du caractère névrosé et obsessionnel du père. Une incantation monocorde parfois à la marge de l’ennui, réveillée par une construction habile, des dialogues pimentés, un quota de scènes torrides, des considérations pertinentes ou déroutantes sur le sexe, la paternité, les troubles du comportement alimentaire, la commisération, le couple ou le pardon. Et le dernier chapitre prend à revers les inattentifs.
Tirza
GRUNBERG Arnon