Au dĂ©but des annĂ©es soixante, lâOuganda, dopĂ© Ă lâidĂ©ologie socialiste panafricaine, vit dans lâespoir de lendemains meilleurs au terme de lâexpĂ©rience coloniale britannique. Câest dans cette ambiance de transition que deux jeunes Africains misĂ©rables et dĂ©racinĂ©s se rencontrent sur le campus de Kampala. Le premier, Isaac, venu dâune tribu du Nord, a perdu ses parents dans les combats prĂ©cĂ©dant lâindĂ©pendance et voudrait Ă©tudier la politique pour jouer un rĂŽle dans son pays. Quant Ă son nouvel ami, dâorigine Ă©thiopienne, il rĂȘve de devenir un Ă©crivain aussi cĂ©lĂšbre que Dickens ! Aucun des deux nâa bien sĂ»r les moyens de sâinscrire en facultĂ© aussi se font-ils passer pour des Ă©tudiants, se mettant Ă la tĂȘte dâune rĂ©bellion au sein du campus. Quelques mois plus tard, sur fond de guerre civile, Isaac, Ă la solde dâun puissant leader politique, se voit menacĂ© et obligĂ© de fuir lâOuganda. MystĂ©rieusement muni dâun visa dâun an pour suivre un cursus universitaire en AmĂ©rique, Isaac est accueilli dans une petite ville du Midwest par une jeune assistante sociale qui – au risque du scandale – tombe amoureuse de ce personnage dont mĂȘme le nom est une Ă©nigme⊠ Dinaw Mengestu continue, comme dans lâensemble de son oeuvre, Ă explorer les thĂšmes du dĂ©racinement des immigrĂ©s fuyant leur pays en guerre et du dĂ©fi que suppose lâassimilation dans des sociĂ©tĂ©s aux antipodes de leur culture. Il le fait ici Ă travers les destins croisĂ©s de personnages en butte Ă la pauvretĂ© et au chaos en Afrique, puis au racisme et Ă la raideur des prĂ©jugĂ©s dans lâAmĂ©rique profonde des annĂ©es soixante.  Une construction trĂšs habile donne voix tour Ă tour Ă lâami dâautrefois et Ă lâamante actuelle pour dessiner peu Ă peu le portrait dâun jeune Africain confrontĂ© aux violences dâune dictature naissante, puis Ă lâexil dans un pays oĂč le mĂ©pris rĂ©servĂ© aux Noirs vient briser rĂȘves et illusions. Ecriture au stylet, finesse dâanalyse, richesse de dĂ©tails, suspense parfaitement maĂźtrisĂ© servent magistralement ce roman grave sans ĂȘtre pesant et qui jamais ne peut ĂȘtre taxĂ© de manichĂ©isme. (P.H. et C.G.)
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MENGESTU Dinaw