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Elle a Trop de chance d’avoir choisi de naître dans cette famille qui se consacre au « Travail sur nous », d’être venue vivre près du Maître dans la Grande Maison dont elle ne doit pas parler. Elle s’y rendait naguère avec les autres enfants du « Travail sur nous », mais désormais elle reste seule à la maison avec sa soeur aînée quand leurs parents participent à des réunions. Pas question de regarder la télévision comme les gens ordinaires qui jouent et rient dans le jardin d’à côté…
L’enfant dit l’ennui des soirées solitaires, la peur d’un visage aperçu à la fenêtre, le chagrin de la mort d’une chienne. Toujours abandonnée à elle-même, questions et émotions sont interdites. Quand elle échoue, elle se sent indigne d’avoir« Trop de chance », et elle jalouse les grandes qui rencontrent le Maître en tête-à-tête. Manipulation, secte, abus sexuel, jamais nommés, sont en filigrane d’un récit dénué de sordide. L’écriture économe a l’authenticité du vécu, restitue la naïveté de la narratrice, et sait faire deviner l’indicible au-delà des mots d’une petite fille.