Mai 1945. Le père, officier, a combattu pour la France. La jeune mère et ses deux enfants quittent l’Algérie et s’installent à Tours dans la maison où vivent les grands-parents. Après la lumière et les grands horizons, la petite fille est confrontée à l’étouffement et à la tristesse de la vie provinciale et à la sévérité d’une mère soucieuse de tenir son rang et de sauver les apparences malgré les difficultés de l’époque. Christine Jordis (Paysage d’hiver : voyage en compagnie d’un sage, HdN janvier 2016) a consacré Une vie pour l’impossible (NB novembre 2012) à son père. Cette fois, elle compose le portrait de sa famille maternelle, entre récit de mémoire et essai autobiographique. Elle ranime ses impressions d’enfant livrée aux violences incompréhensibles d’une mère déçue par le mariage, arc-boutée sur les convenances de son milieu et son soi-disant sacrifice au devoir familial. Plus court, un volet est consacré à une grand-mère extravagante, folle de son corps, ancrée dans le siècle précédent. Avec la distance du temps, en replaçant les faits dans l’époque oubliée de l’après-guerre, l’auteure parvient à expliquer les comportements insoutenables de deux femmes à l’origine de l’enfance malheureuse dont elle a finalement pu se consoler grâce à l’imaginaire, la lecture et le voyage. Amer et lucide. (T.R. et C.-M.T.)
Tu n’as pas de coeur…
JORDIS Christine