Veuf sans enfants, à la retraite, il entreprend d’écrire ses mémoires. Il esquisse à peine son enfance américaine dans une famille presbytérienne et ses débuts de carrière de diplomate francophone pour se focaliser sur son séjour à Saïgon au service de la CIA, juste avant le retrait des troupes américaines. Alors qu’il termine le volet vietnamien de son récit, il est invité à reprendre contact avec son ancien patron de l’époque, dont le cynisme et l’inhumanité l’avait profondément ébranlé.
Impossible de lâcher cet enthousiasmant roman d’un auteur irlandais (Voyage en territoire inconnu, Les Notes février 2022) qui coche toutes les cases tant sur le fond que sur la forme. Son beau style classique décrit avec autant de subtilité les remous de l’âme des héros et l’ambiance délétère dans laquelle ils évoluent, que le grouillement de la capitale sud-vietnamienne – ses encombrements, ses trafics louches, ses bars à soldats – et le vent de panique qui précède la débâcle. En parallèle et tout aussi réussis sont les portraits et la confrontation entre les deux héros si contrastés, l’un marqué par une éducation moraliste, l’autre sans scrupules pour qui viendra le temps de la rédemption, thème qui, avec ceux de la trahison et de la culpabilité, donne une grande profondeur au livre. (L.K. et A.Be.)