Au commencement : un projet de film dont le personnage central serait Nikki Delage, une brillante avocate investie dans la défense des droits des exclus, encensée par la presse qui voit dans ses combats victorieux, un écho à ses origines humbles et au passé militant de son père algérien. Plus belle est l’icône, plus vite elle est démolie quand la même presse révèle ses origines : une riche famille d’industriels bordelais. Elle a donc menti ! Clouée au pilori, elle s’est réfugiée dans la maison familiale, le Palais d’été. Point final à un fait divers ? Luce et Jeanne, deux amies cinéastes, veulent passer au-delà de ces apparences…
Quelle belle écriture, simple, élégante ! Porte d’entrée de ce roman dont le rythme narratif est celui de l’enquête qui le structure, enchaînant, au gré de l’intrigue, les témoignages de la menteuse et de ceux qui l’ont côtoyée. Dans les propos relevés, les deux enquêtrices cherchent plus le non-dit que le dit, le mensonge encore possible plus que l’aveu, le regret plus que l’amertume. Des tranches de vie qui reconstituent un parcours de vie : c’est habile mais, plus encore, révélateur de ce que le regard des autres dit de nous. La finesse de l’analyse fait pardonner quelques artifices de l’intrigue car les ressorts possibles du mensonge y sont déclinés, dans leur multiplicité douloureuse. Au-delà, et pour chacun de nous, c’est de la fabrique de l’identité qu’il est question ici. Passionnant ! (C.B et S.H)