Formés à l’Institut supérieur de peinture de Bruxelles, Paula, Jonas et Kate forment un trio soudé par de riches mois d’apprentissage. Les sinus mis à vif par les solvants, le dos cassé par la cambrure, ils ont appris à connaître leur corps. Devenus artistes du trompe-l’oeil, ils suivent des voies différentes sans se perdre. Entre deux escales chez ses parents, Paula voyage d’un chantier à l’autre, de Moscou aux studios de Cinecittà, de Paris à Lascaux. Maylis de Kerangal (Réparer les vivants, NB février 2014) s’empare d’un sujet pictural jugé mineur, le dote de la puissance du romanesque et transmet à sa plume la délicatesse du pinceau. Sur sa palette un semis de nuances, un vocabulaire rigoureux et une combinaison de mots pour créer la vision. Écaille de tortue ou veine du marbre Portor, chaque copie demande d’habiter le modèle, d’acquérir ce geste où technique et humilité se confondent. En un champ contre-champ, calée dans son écriture phénoménologique dont les longues phrases sont parfois volubiles à l’extrême, la romancière donne au temps d’apprentissage toute sa poésie, devenant plus pédagogique sur les chantiers professionnels. Et par-delà l’émerveillement devant la réalisation, s’attarde le dilemme du copiste s’effaçant devant le modèle… (Maje et B.Bo.)
Un monde à portée de main
KERANGAL Maylis de