Un poisson sur la lune

VANN David

Fragilisé par une dépression, Jim, dentiste quadragénaire établi en Alaska, vient en Californie renouer avec sa famille, un revolver Magnum au fond de son sac. Le but de son frère cadet est de mettre fin à la spirale suicidaire dans laquelle Jim semble se complaire.  Il ne s’en cache pas, David Vann (L’obscure clarté de l’air, NB octobre 2017) a puisé dans l’histoire familiale pour dépeindre l’état d’anéantissement psychologique d’un homme atteint de dépression : son propre père. Il utilise les phases de la maladie, à la fois symptômes et syndrome, comme support à la narration. La succession d’épisodes d’euphorie quasi hystérique où le personnage divague devant ses enfants sur Dieu, les vagues et les poissons, et les périodes d’auto-apitoiement laissent présager un désastre imminent. Cet homme qui tourne en rond et que seul le sexe apaise, qui cherche auprès des siens une responsabilité à son mal-être, engendre un récit un peu itératif qui gagne en profondeur avec les révélations du père. Chronique d’une mort annoncée dont l’issue reste incertaine jusqu’à la dernière ligne, aveux d’une vie manquée, ce voyage dans le désespoir brosse un portrait très crédible, terriblement nihiliste et oppressant malgré quelques éclats narratifs.  (Maje et M.-N.P.)