Annah aime courir. Plusieurs fois par semaine, elle emprunte la piste cyclable qui sort de la ville et court avec l’acharnement méthodique de qui prépare une compétition. Manière, pour elle, de laisser loin derrière cauchemars et rancoeurs. De se construire en contraignant son corps. Le récit de sa vie suit les battements de son coeur, le rythme de ses foulées. D’une seule voix, le monologue de la jeune fille donne forme à la réalité vécue : retours en arrière, rappel des temps forts, celui, entre autres, où elle a compris que sa mère est une prostituée ukrainienne. Au-delà de l’image convenue d’une telle existence, se dessine le lien fort qui unit l’enfant à sa mère, dans le non-dit, le poids des regards, la peur d’être stigmatisée, la crainte de ne pouvoir aimer. Le prétexte à ce monologue n’échappe pas au cliché : le garçon à qui il est destiné a lui aussi un parcours tortueux. Mais la construction du texte, le rythme des séquences qu’il enchaîne, l’alternance marquée entre récit et commentaire pour soi, lui assurent un tempo prenant. L’émotion gagne le lecteur. (C.B. et A.-M.R.)
Une fille de…
WITEK Jo