Une nuit en Tunisie

GABRIEL Fabrice

1990. Janvier quitte sa famille. Sa grande malle est lourde : Perec, Cervantès et beaucoup d’autres l’accompagnent. Coopérant, il doit rejoindre Sidi Bouzid, en Tunisie, où commencera bien plus tard la révolution de Jasmin. Là-bas, Serge, l’autre coopérant, pianiste exalté et mélancolique, devient son ami. Ils fréquentent quelques notables et suivent, inquiets, les premiers bruits de guerre : le conflit du Golfe se déroule pendant ce séjour tunisien. Aujourd’hui, vingt/vingt-cinq ans plus tard, les souvenirs affleurent, alors que les parents aimés vieillissent et meurent, penchés eux aussi sur leurs images d’autrefois…     Style et construction sont élaborés et l’élégance de quelques phrases séduit au passage. Pas d’histoire, peu d’événements, mais à travers les filtres de la mémoire et du rêve, la reconquête incertaine du passé, de ses souvenirs flottants se cristallisant autour de quelque détail. S’y mêlent les voyages de Paul Klee, de Flaubert ou de Perec en Tunisie, les guerres récentes du Moyen-Orient… Des évocations de Virgile, Le Corbusier, Tintin, saint Augustin, Walter Benjamin ou du jazzman Bud Powell ouvrent ici et là de nouveaux espaces. Tout en mesurant l’étendue de la culture de Fabrice Gabriel (Norfolk, NB décembre 2010), le lecteur, dérouté, hésite parfois sur leurs seuils. (M.W. et A.Le.)