Deux frĂ©gates, la Boussole et lâAstrolabe, font naufrage en 1788 sur la barriĂšre de corail dâune Ăźle perdue du Pacifique, Vanikoro. Elles rentraient au pays les cales riches de dĂ©couvertes et dâobservations glanĂ©es autour du Monde. Câest lâhorreur, la tempĂȘteâŠLes survivants sont jetĂ©s Ă la cĂŽte qui se rĂ©vĂšle inhospitaliĂšre. Le cauchemar est total ; la nature est sombre, piĂ©geuse, les bruits inconnus, les « naturels » agressifs. La Boussole est engloutie en quelques minutes et les rescapĂ©s assistent impuissants au pillage de leurs compagnons noyĂ©s. LâAstrolabe, elle aussi, est perdue mais laissera plus de temps pour y rĂ©cupĂ©rer de quoi survivre et tenter dâenvisager un futur. Les officiers survivants maintiennent la discipline et un peu dâorganisation qui sera dĂ©risoire face aux dangers qui rodent. La peur nâempĂȘche pas la cupiditĂ© de certains : le coffre contenant des piĂšces dâor a pu ĂȘtre sauvĂ©. AprĂšs avoir construit une palissade autour du camp et mis en chantier un bateau pour tenter de gagner un port salvateur, les naufragĂ©s affronteront leurs destins.
On connait avec prĂ©cision les pĂ©ripĂ©ties et les dĂ©couvertes de lâexpĂ©dition La PĂ©rouse entre aoĂ»t 1785 et mars 1788. Par contre, on est obligĂ© de sâen remettre Ă la tradition orale, Ă notre imagination, aux traces laissĂ©es par les naufragĂ©s pour comprendre leur aventure. Si au XVIII siĂšcle on ne connaissait pas la fin de cette belle histoire (Louis XVI montant Ă lâĂ©chafaud aurait demandĂ©Â : « A-t-on des nouvelles de La PĂ©rouse ? »), le trĂ©sor nâa pas Ă©tĂ© trouvĂ© malgrĂ© les nombreuses expĂ©ditions et fouilles qui ont eu lieu sur place. La version proposĂ©e par Patrick Prugne est somptueuse et crĂ©dible. Que ce soit les tenues et lâarmement des « naturels » ou des français, leurs habitations ou leurs embarcations, on est conquis par les images. La mise en pages est variĂ©e et utilise selon les Ă©tapes du rĂ©cit, soit des panoramiques larges soit des cases en hauteur, le tout avec un dessin soignĂ© et retenu. Que dire des dĂ©gradĂ©s de couleur et des trognes des marins ? VoilĂ lâoeuvre dâun « passionnĂ© au sommet de son art ». (D.L. et C.D.)